Le raton laveur, hôte de plus en plus envahissant en Belgique
Garde forestier dans le Sud de la Belgique, Thierry Petit est de plus en plus sollicité pour éliminer des ratons laveurs. Ce mammifère, classé comme espèce exotique envahissante en Europe, prolifère en Wallonie au risque de menacer la biodiversité et de transmettre des maladies.
"On ne peut plus répondre à toutes les sollicitations", explique cet agent sur le site forestier de la Barrière Mathieu, à Tenneville.
"On n'intervient plus quand il s'agit juste de quelqu'un qui signale des ratons laveurs dans son jardin. On va réduire les populations là où il a un risque réel pour la cigogne noire, pour l'hirondelle des rivages, là où on peut vraiment protéger un habitat".
Ces animaux omnivores, connus pour leur masque noir et leur queue rayée, sont apparus en Belgique dans les années 1980 et leur population dans le Sud du pays est estimée à des dizaines de milliers d'individus. Excellents grimpeurs, très agiles, ils peuvent aussi causer des nuisances dans les jardins et entrer dans les habitations par les chatières notamment.
Une partie de la population de ratons laveurs provient d'Allemagne, où ils avaient été introduits dans les années 1930 comme nouvelle espèce de chasse et pour la production de fourrure, rappelle Vinciane Schockert, biologiste. L'autre foyer a été une base militaire dans l'Aisne en France où des soldats américains avaient apporté ces mascottes et les y ont laissées dans les années 1960.
"A partir de 2005, on a commencé à voir beaucoup d'empreintes le long des cours d'eau et à apercevoir des ratons laveurs victimes de collisions sur les routes, indicateur que la population se développe. Elle a aussi été favorisée par la succession d'hivers doux", poursuit l'experte.
- "Bonne bouille" -
La scientifique mène des études pour mesurer l'impact de ce mammifère sur les espèces sensibles, comme la chouette hulotte ou le cincle plongeur, un oiseau qui fait des nids très bas dans les berges des cours d'eau, facilement accessibles pour les ratons laveurs.
Face à cette prolifération, les autorités wallonnes ont annoncé préparer un plan d'action.
"C'est un animal qui a une bonne bouille. Malheureusement les espèces exotiques envahissantes (...) sont l'une des cinq principales causes de dégradation de la biodiversité à l'échelle mondiale", rappelle la ministre wallonne de l'Environnement, Céline Tellier, lors d'un entretien avec l'AFP à Namur.
Il s'agit de "sensibiliser la population avec des gestes simples: éviter de nourrir les ratons laveurs, protéger les entrées de la maison la nuit, toute une série de dispositions pour éviter d'aggraver la situation", indique-t-elle.
"Aujourd'hui l'espèce est tellement répandue dans notre territoire qu'on doit apprendre à vivre avec, mais en même temps apprendre à la gérer aux endroits où elle pose le plus de problèmes et éviter de multiplier sa propagation", poursuit la ministre.
Quand il y a "nécessité de détruire certains individus" parmi les ratons laveurs, cela doit se faire "de la manière la plus éthique possible", souligne la ministre écologiste, ajoutant qu'une "réflexion est en cours avec le conseil du bien-être animal en Wallonie" à ce propos.
Chasseur dans la région de Ciney (Sud), Simon Taviet va régulièrement relever son piège à ratons laveurs. Ce matin-là, à son arrivée, l'un d'eux est coincé dans la cage. Le jeune homme de 18 ans, armé d'une carabine, abat l'animal ainsi piégé.
"On limite leur présence à cause des maladies qu'ils peuvent transmettre, et les dégâts qu'ils peuvent occasionner sur les cultures", explique l'étudiant en agronomie et environnement. "Ils portent atteinte aux espèces indigènes", ajoute-t-il. Lui-même s'est fait mordre au doigt par un raton laveur qui s'en était pris à son chien lors d'une battue.
Pour Benoît Petit, président du Royal Saint-Hubert Club de Belgique, principale association de chasseurs du pays, "il serait temps que la région wallonne organise un service de piégeage et de régulation des ratons laveurs".
"Un citoyen qui en a marre, il va le piéger, et après? Il ne va pas utiliser une arme à feu, ni payer un vétérinaire pour une injection", dit-il. "Il faut limiter l'explosion démographique et l'extension géographique", plaide-t-il.
L. Andersson--BTZ