"Mayotte debout": Bayrou dévoile son plan pour l'archipel dévasté par Chido
Empêcher la reconstruction des bidonvilles, rétablir l'électricité "dans chaque foyer" d'ici fin janvier: François Bayrou a annoncé lundi une batterie de mesures lors de sa visite à Mayotte, deux semaines après le passage du dévastateur cyclone Chido.
Après une visite d'une journée à la tête d'une importante délégation ministérielle, le Premier ministre a présenté devant le Conseil départemental de l'archipel son plan "Mayotte debout" qui "a une seule ligne directrice: pas de phrases, des décisions concrètes et précises, des engagements concrets et précis".
En parallèle, une "loi d'urgence" sera présentée vendredi en Conseil des ministres, avec "une présentation au Parlement sous quinze jours", a annoncé M. Bayrou. Un projet de "loi programme de refondation" de l'archipel "préparé et conçu avec les élus de Mayotte, sera mis au point dans les trois mois, a-t-il précisé.
Parmi les dispositions-phares détaillées lundi par le chef du gouvernement, l'engagement de l'Etat et des pouvoirs publics locaux à "interdire et empêcher la reconstruction des bidonvilles", reprenant un mantra d'Emmanuel Macron, venu les 19 et 20 décembre sur place.
Une volonté qui pourrait être "inscrite dans la loi", alors qu'environ un tiers de la population de ce département le plus pauvre de France réside dans des habitats précaires, entièrement détruits.
Face à l'urgence d'un archipel ravagé et encore en partie privé de services essentiels, M. Bayrou a également demandé que l'électricité soit "rétablie dans chaque foyer fin janvier", grâce notamment à "un renfort de 200 agents" et l'arrivée de "200 groupes électrogènes, une dizaine par commune" pour faire fonctionner "les équipements indispensables".
"Avant la fin de la semaine, le volume de production d'eau potable obtenu avant Chido sera atteint", a promis le chef du gouvernement en évoquant une "intervention" imminente de "l'armée" aider au rétablissement du réseau.
Le Premier ministre a aussi annoncé le lancement d'un "plan vigilance" à Mayotte associant armée et gendarmerie pour "surveiller" les établissements scolaires face aux menaces d'incendie et de pillage. Le maire de Mamoudzou venait, en séance, de dénoncer que l'on ait lundi "brûlé une école de la République" transformée depuis quinze jours en centre d'hébergement.
Face à l'immigration irrégulière - le département compte 320.000 habitants selon l'Insee, mais peut-être 100.000 à 200.000 de plus avec les sans-papiers - M. Bayrou a plaidé pour un "recensement général et précis de la population".
Une "opération vérité qui permettra de sortir des ambiguïtés et des incohérences que beaucoup d'élus ont signalé sur l'appréciation numérique de la population", a-t-il fait valoir, alors qu'il avait plus tôt dans la journée jugé "irresponsable" de prétendre "qu'il n'y a pas un problème d'immigration brûlant à Mayotte".
Sur le volet économique, M. Bayrou a indiqué que les cotisations sociales seraient suspendues "pour toutes les entreprises jusqu'au 31 mars". Des compensations de pertes de chiffres d'affaires, ou encore des facilités de prêts sont également prévues.
- Objectif: deux ans -
"Il ne s'agit pas seulement de reconstruire Mayotte comme elle était. Il s'agit de dessiner l'avenir de Mayotte, différent", avait expliqué dans la journée M. Bayrou, qui a répété son "objectif" de rebâtir Mayotte en deux ans, désireux de "faire mentir la fatalité".
Accompagné de cinq ministres, dont les ministres d'Etat Elisabeth Borne (Education) et Manuel Valls (Outremer), François Bayrou a notamment visité l'usine de dessalement d'eau de Petite Terre, un hôpital de campagne, une école dont plusieurs salles de classes ont été dévastées, avant de multiplier les rencontres avec les forces vives et les élus de l'île.
Chido, cyclone le plus dévastateur à Mayotte depuis 90 ans, a causé le 14 décembre la mort de 39 personnes et fait plus de 5.600 blessés, selon un bilan publié dimanche par la préfecture.
Concernant le bilan des victimes, M. Bayrou a appelé lundi à une "très grande prudence", affirmant que les "rumeurs de milliers de morts" n'étaient "pas fondées" et que les décès se comptaient plutôt en "quelques dizaines ou quelques centaines".
A l'issue de sa visite à Mayotte, M. Bayrou se rendra sur l'île de La Réunion, importante base logistique pour l'aide à l'archipel mahorais, où il poursuivra sa visite mardi matin avant de regagner la métropole.
"Dans le sud, dans le nord, on est les oubliés de ce territoire. Ils (les plus hauts responsables politiques) restent toujours à Mamoudzou", déplore une habitante, Marachi Maoulida, "déçue" de cette visite primo-ministérielle d'une journée mais qui veut rester "optimiste".
Présent dans sa délégation, son ministre d'Etat en charge des Outremer, Manuel Valls, restera deux jours supplémentaires à Mayotte.
H. Müller--BTZ