"Hazel l'Ouragan": à 101 ans, l'icône de la politique canadienne n'a pas fini de tourbillonner
Hazel McCallion, 101 ans, a eu plusieurs vies et n'a pas l'intention de ralentir: elle a été récemment reconduite au conseil d'administration de l'aéroport de Toronto, le plus grand du pays, après avoir été maire pendant 36 ans et joueuse de hockey professionnelle.
Sa fougue lui vaut d'être connue comme "Hazel l'Ouragan". "Je ne sais pas comment j'ai récupéré ce surnom... Je sais que je me déplace rapidement", explique-t-elle en riant lors d'un entretien à l'AFP à Mississauga, ville de la banlieue de Toronto qu'elle a dirigée et qui organise une exposition sur sa vie.
Ce bourreau de travail, que rien ne semble arrêter, confie avoir un mantra dans la vie: "Travaille, fais tes devoirs".
"Travailler dur n'a jamais tué personne, c'est ce que ma mère m'a appris. Si vous voulez atteindre vos objectifs, vous devez travailler dur", conseille cette petite femme aux cheveux blancs, installée jambes croisées sur une chaise à bascule.
Née en 1921 à Port-Daniel, un village côtier de l'est du Québec, Hazel est la cadette de cinq enfants. Son père travaille dans le secteur de la pêche; sa mère est infirmière.
A 16 ans, elle quitte la ferme familiale pour poursuivre sa scolarité avant de se résigner à intégrer, faute de moyens, une école de secrétariat. Sa carrière débute durant la Seconde Guerre mondiale dans une entreprise d'ingénierie au sein de laquelle elle travaillera durant plus de 20 ans.
En parallèle, elle joue dans une équipe professionnelle de hockey féminin à Montréal, payée 5 dollars le match, une somme généreuse à l'époque. Cette fan des Maple Leafs, l'équipe de Toronto, y laissera deux dents.
En 1951, elle épouse Sam McCallion avec qui elle aura trois enfants.
"Elle n'était pas toujours là, mais elle l'était quand il le fallait", raconte l'un de ses fils, Peter, décrivant une "merveilleuse" grand-mère pour son unique petite-fille.
- Retraite politique à 93 ans -
Inspirée par l'ancienne édile d'Ottawa Charlotte Whitton, première femme maire d'une grande ville au Canada, et par Margaret Thatcher, elle choisit d'entrer en politique dans les années 60.
En 1978, elle remporte la mairie de Mississauga en partie grâce à son impassibilité face aux commentaires sexistes de son adversaire.
Pourtant, aujourd'hui elle coupe court à toute discussion sur le sujet: "Ca n'a pas été difficile du tout. J'ai été appuyée par des hommes à la fois dans le monde des affaires et dans la vie politique", déclare-t-elle, s'estimant "très chanceuse".
Elle a profondément marqué l'histoire de Mississauga, ville de plus de 700.000 habitants aujourd'hui, qui a radicalement changé de visage en quelques décennies.
Lors de sa première année à la mairie, elle doit gérer un accident ferroviaire majeur: le déraillement puis l'explosion d'un train chargé de produits toxiques.
Près de 220.000 habitants, soit les trois quarts de la ville sont évacués en urgence et il n'y a aucun mort ni blessé grave. Le "miracle de Mississauga" lui donne une stature nationale.
"Pour vivre une vie heureuse, il faut être très positif et sentir que l'on agit. Vous ne pouvez pas penser à vous tout le temps", glisse-t-elle pour expliquer son engagement.
En poste pendant douze mandats, elle détient un record de longévité, qui tient en partie à "son populisme très terre-à-terre", "son accessibilité" et "son franc-parler", explique Tom Urbaniak, auteur d'un livre sur le développement de la ville.
"Hazel McCallion penche vers le conservatisme mais elle est extrêmement pragmatique. Au fil des décennies, elle a changé d'avis souvent selon l'opinion publique", indique ce professeur de politique à l'université du Cap-Breton (Nouvelle-Ecosse, est du Canada) qui rappelle qu'elle a "appuyé divers partis politiques".
Celle qui se considère comme une "bâtisseuse" a décroché en 2011 le titre de "maire la plus populaire du Canada", trois ans avant de prendre sa retraite politique, à 93 ans.
Collectionneuse de timbres, Hazel McCallion aime aussi jardiner et tourner des vidéos pour des organisations caritatives. Elle reste attentive à l'actualité et porte, accroché à sa veste, un ruban jaune et bleu aux couleurs de l'Ukraine.
"J'ai vécu 100 ans et je n'ai jamais été aussi pessimiste par rapport à ce qui se passe dans le monde aujourd'hui", lance-t-elle.
D. Wassiljew--BTZ