Nucléaire: l'EPR de Flamanville raccordé au réseau, une première en France depuis 25 ans
Après 17 ans de chantier, dont 12 de retard, le réacteur nucléaire EPR de Flamanville (Manche), réacteur le plus puissant de France, a été raccordé samedi au réseau électrique national, a annoncé le groupe EDF, Emmanuel Macron saluant "un grand moment".
"Samedi 21 décembre 2024 à 11h48, l'EPR de Flamanville a été connecté au réseau électrique français et a commencé à produire ses premiers électrons. C'est un évènement historique pour toute la filière nucléaire française. Le dernier démarrage d'un réacteur en France remonte à celui de Civaux 2, il y a 25 ans", a indiqué le PDG d'EDF Luc Rémont, sur le réseau social professionnel LinkedIn.
Ce raccordement est un "grand moment", a réagi le président Emmanuel Macron, dans un message posté également sur LinkedIn.
"Grand moment pour le pays. L'un des réacteurs nucléaires les plus puissants du monde, l'EPR de Flamanville, vient d'être raccordé au réseau électrique. Réindustrialiser pour produire une énergie bas carbone, c'est l'écologie à la française. Elle renforce notre compétitivité et protège le climat", a affirmé le chef de l'État.
Ce premier raccordement d'un nouveau réacteur en France depuis 1999 était prévu initialement vendredi matin, mais avait été repoussé de plusieurs heures.
Il devait se faire à basse charge, à environ 20% de la puissance du réacteur (1.600 mégawatts), pour vérifier que "tout va bien" avant d'enchaîner les essais supplémentaires pour arriver à 100% de puissance à l'été 2025, a expliqué l'entreprise publique vendredi.
Après le chargement en combustible réalisé en mai et la première réaction nucléaire au sein du réacteur début septembre, le couplage au réseau est la troisième étape d'entrée en fonctionnement de Flamanville 3, réacteur à eau pressurisée de nouvelle génération qui doit alimenter en électricité environ deux millions de foyers.
Un premier cycle d'activité industrielle de 18 mois s'annonce, fait de production mais avec encore de nombreux tests, en particulier lors de la montée en puissance.
- Six à 14 autres EPR -
Ce lancement d'un réacteur de conception nouvelle, de la part du pays le plus nucléarisé au monde (par habitant), était particulièrement attendu au terme d'un chantier lancé fin 2007.
Il intervient avec 12 ans de retard par rapport au calendrier initial du fait d'aléas techniques - défauts de soudures, défaut dans l'acier de la cuve... - entre nouveau design, complexité du chantier mais aussi pertes de compétences dans la filière nucléaire française, expliquées selon les experts par la pause observée par le pays dans la construction nucléaire.
Avec ces délais, la facture de Flamanville 3 a explosé. Elle est désormais estimée à 13,2 milliards d'euros par EDF, soit quatre fois le devis initial de 3,3 milliards. En 2020, la Cour des comptes l'avait évaluée à 19 milliards, en incluant les "surcoûts de financement".
L'EPR ("European Pressurized Reactor"), réacteur à eau pressurisée de nouvelle génération, est le quatrième de ce type installé dans le monde (après deux en Chine, un en Finlande), et le 57e du parc nucléaire français.
Né en 1992 d'une entreprise commune du groupe français Framatome (devenu Areva) et de l'allemand Siemens, il avait reçu un premier feu vert officiel de la France en 2004.
Le pays, après avoir tenté ensuite une pause dans le recours à l'atome civil, a décidé en 2022, avec le président Emmanuel Macron, de relancer le secteur nucléaire en commandant à EDF six nouveaux réacteurs (et huit supplémentaires en option).
Mais le cadre budgétaire se fait attendre pour ce chantier d'autant plus lourd que l'énergéticien EDF, détenu à 100% par l'Etat français, est lourdement endetté.
Le manque de visibilité politique n'arrange pas les choses, à en croire le quotidien économique Les Echos. Selon ce journal, qui évoque plusieurs sources, le conseil d'administration d'EDF a voté pour 2025 une baisse de l'enveloppe dédiée aux travaux préparatoires, qui passe ainsi de 2 milliards d'euros à une fourchette de 1,1 à 1,3 milliard.
Une information qu'a confirmée à l'AFP une source interne à EDF, mais que réfute la direction du groupe. Celle-ci affirme que le montant des investissements n'est à ce stade "pas décidé" et qu'il "sera examiné plus tard", une fois que seront définies l'ensemble des modalités du programme.
F. Dumont--BTZ