Edimbourg pleure la reine et s'attelle aux préparatifs
Tristesse, bruine, et, en creux, une forme étrange d'effervescence. Edimbourg pleure la reine Elizabeth II et se prépare à accueillir le cercueil de la monarque qui s'est éteinte jeudi dans son château écossais de Balmoral.
Contre un mur humide de Holyroodhouse, palais officiel de la monarchie dans la capitale écossaise, les fleurs, qui ont commencé à être déposées dès la veille se font de plus en plus nombreuses.
Gary Millar, technicien de 45 ans, dépose un bouquet et se recueille en silence. Dès le petit matin, il est venu pour témoigner son "respect" envers la reine, "l'honorer".
"Elle nous a honoré pendant tout son règne en accomplissant son devoir", souligne-t-il la voix serrée par l'émotion. C'est le moment pour le public de "lui rendre un peu de ce qu'elle a offert au pays pour marquer son respect".
En Ecosse, dirigée par un gouvernement indépendantiste, la reine est bien plus populaire que la monarchie elle-même. Mais pour Gary Millar, la souveraine a "maintenu le pays ensemble", elle était "la figure de proue de l'union de notre Grande-Bretagne".
"Elle a été là toute ma vie", poursuit-il, soulignant le "dur travail" et le "dévouement" de la monarque.
- Le "bon monarque pour l'époque" -
C'est à Holyroodhouse que le cercueil de la reine est attendu dans les prochains jours. La dépouille sera ensuite portée en procession par le Royal Mile, l'artère principale de la capitale écossaise, jusqu'à la cathédrale Saint-Gilles où un service religieux se tiendra en présence de la famille royale et le public pourra se recueillir.
Le cercueil sera ensuite acheminé, a priori en avion, vers Londres.
A pied du mur, des jardiniers arrangent la pelouse sur un fond sonore de tondeuse et de débroussailleuse, dans une odeur humide mêlant essence et herbe coupée.
Emue aux larmes, Rebecca Evans, 44 ans est simplement "triste", bien que la disparition de la reine ne soit pas "inattendue".
"Elle a accueilli la nouvelle Première ministre" Liz Truss mardi et semblait "aller bien" et "jeudi elle nous quitte, c'est très très triste", sanglote-t-elle.
"Il se passe tellement de choses au Royaume-Uni en ce moment", poursuit cette femme blonde vêtue d'un sweat-shirt fuchsia, énumérant le Brexit, "ce gouvernement", la "crise de l'énergie", "la récession". La mort de la reine représente une "telle tristesse".
Les Ecossais sont "notoirement grincheux", relève-t-elle, mis "on aime vraiment la reine" et "la famille royale". Travaillant pour un cercle de réflexion consacré au réchauffement climatique, elle prédit que le roi Charles III "sera un bon monarque", le "bon monarque pour cette époque".
"Il a été tourné en ridicule mais il est temps d'agir" pour le climat et l'environnement, estime-t-elle, soulignant que le nouveau souverain et son fils William "soutiennent cela".
- "Jamais en grève" -
Le fait que le cercueil de la reine repose dans un premier temps en Ecosse est selon elle une source de fierté localement, alors que "tout est centré sur Londres".
"Quand vous voyez les montagnes dans la brume, c'est tellement magnifique, on ne peut pas imaginer une plus belle manière de partir que de s'éteindre paisiblement dans les montagnes", ajoute-t-elle très émue.
"Tout le monde travaille très dur", souligne-t-elle, citant entre autres policiers et agents de sécurité qui guident le public. Par respect pour la reine, postiers et cheminots ont annulé leurs grèves. "C'est très britannique, c'est peut-être la réponse la plus britannique", parce que la reine "ne s'est jamais mise en grève", souligne Rebecca Evans.
Irlandaise de 48 ans installé à Edimbourg, Orla Bell est venue pour déposer des fleurs car sa mère est une "grande fan de la famille royale". Tant et si bien qu'il y a 25 ans, elle avait laissé un bouquet pour sa mère quand la princesse Diana est morte.
"La reine était comme une mère pour tout le pays", songe-t-elle, "je crois que Tony Blair l'avait qualifiée de matriarche du pays". Mais "même si vous n'êtes pas un fan de la famille royale ou n'êtes pas Britannique, je crois que c'est important pour tout le monde".
A. Madsen--BTZ