Les agriculteurs ulcérés par la signature avec le Mercosur, prévoient de "durcir" leurs actions
Sonnés coup sur coup par la vacance gouvernementale à Paris et la conclusion d'un accord de libre-échange par l'Union européenne avec le Mercosur, les syndicats agricoles français commencent à "durcir" leurs actions en visant des permanences parlementaires.
L'alliance majoritaire FNSEA-Jeunes agriculteurs (JA) a dénoncé une "trahison" quelques minutes après l'annonce par la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen de la conclusion des négociations sur l'accord de libre-échange avec des pays du Mercosur.
Le Copa-Cogeca, principal lobby agricole européen, a embrayé en dénonçant l'envoi par l'exécutif européen d'"un message catastrophique aux millions d'agriculteurs européens". Il a annoncé en même temps une "action flash" lundi à Bruxelles, "en face du Conseil" européen.
Cet accord — qui prévoit des quotas d'importation à droits de douane réduits ou nuls pour le bœuf, le poulet ou encore le sucre — doit encore être ratifié par les États membres.
L'opposition au traité avec le Mercosur fait l'unanimité parmi les syndicats agricoles français, par ailleurs engagés dans une féroce bataille en vue des élections aux chambres d'agriculture.
Ils multiplient les manifestations depuis la mi-novembre, moins d'un an après une mobilisation historique l'hiver dernier qui avait abouti à une moisson historique de promesses gouvernementales (sur des aides d'urgence, des baisses de charges sociales et fiscales, l'assouplissement des contraintes environnementales...).
- "Demander des comptes" -
Après la démission forcée du gouvernement Barnier, qui reprenait plusieurs de ces promesses dans des textes de loi, la mobilisation a commencé à muter.
"Avec la censure [du gouvernement] et Ursula von der Leyen partie en Uruguay (...) les actions vont évoluer, se durcir", a déclaré à l'AFP le secrétaire général des Jeunes agriculteurs (JA), Quentin Le Guillous, quelques heures avant l'annonce de la présidente de la Commission.
L'alliance syndicale majoritaire FNSEA-JA prévoyait un troisième round de manifestations pour les 9 et 10 décembre, axé autour de la défense d'un meilleur revenu, via des actions dans des supermarchés.
Dès jeudi soir, des agriculteurs s'en sont pris à plusieurs permanences de députés ayant voté la motion de censure en Nouvelle-Aquitaine et des actions similaires étaient attendues vendredi.
En Charente-Maritime, les permanences de trois députés — Fabrice Barusseau (NFP) à Saintes, Benoît Biteau (Verts-NFP) à Rochefort et Pascal Markowsky (RN) à Royan —, ont été vandalisées, selon la préfecture, qui évoque "des déversements de déchets, l'inscription de tags et l'utilisation de mousse expansive pour sceller l'entrée des locaux".
"On s'est attaqués aux députés qui ont voté la motion de censure et qui foutent en l'air tout le travail fait jusqu'à présent pour les agriculteurs", a déclaré à l'AFP Cédric Tranquard, président de la FDSEA de Charente-Maritime.
"On appelle [le réseau FNSEA-JA] à aller à la rencontre de tous les députés pour demander des comptes" après la censure du gouvernement, a expliqué Quentin Le Guillous, des JA.
- Refus des contrôles -
Lors d'un meeting FNSEA-JA mercredi soir, M. Rousseau avait reconnu une certaine "gueule de bois" de voir "pour la deuxième fois en moins de six mois le travail (...) réalisé (...) partir à la rivière", en référence aux flottements suscités par la dissolution de l'Assemblée nationale puis la censure du gouvernement de Michel Barnier.
M. Rousseau avait lancé dans la foulée que les agriculteurs n'accepteraient plus de contrôles par l'administration dans leurs fermes "tant que les promesses n'étaient pas tenues".
Les sections locales FNSEA-JA ont commencé à relayer ce message.
"A compter de ce jour, aucun contrôleur ne pourra franchir le seuil de nos fermes tant que les promesses ne sont pas honorées", ont prévenu les organisations de Seine-Maritime vendredi dans un communiqué.
"Nous invitons tous les agriculteurs qui seraient confrontés à un contrôle dans les prochains jours à nous avertir", ajoutent-elles.
La FNSEA et les JA d'Indre-et-Loire précisent elles que "ce refus sera signifié à l'administration concernée".
K. Petersen--BTZ