La fuite en avant de Donald Trump
De plus en plus candidat, Donald Trump a suggéré qu'il pourrait gracier des assaillants du Capitole s'il était réélu président, une surenchère politique qui répond à une enquête parlementaire dont la menace se fait de plus en plus pressante.
Les propos de l'ancien président lors d'un meeting au Texas ce week-end ont provoqué un malaise jusque dans son parti.
"Si je me présente, et si je gagne, nous traiterons équitablement ceux du 6 janvier", a-t-il lancé au sujet de ses partisans qui ont envahi le siège du Congrès américain, lors de son deuxième meeting en deux semaines.
Avant de promettre "la plus grande manifestation jamais vue, de Washington à New York en passant par Atlanta", si jamais des procureurs faisaient "quoi que ce soit d'illégal" dans les enquêtes sur ses affaires et sa personne.
L'une de ces investigations, menée par une commission parlementaire à majorité démocrate, cherche à faire la lumière sur sa responsabilité dans l'attaque du Congrès par ses partisans le 6 janvier 2021. Et dessine peu à peu le tableau d'un président qui a usé de tous les moyens à sa portée pour tenter de s'accrocher au pouvoir.
- Papiers recollés -
Comme ce projet de décret (jamais signé) de la Maison Blanche qui ordonnait au plus haut responsable militaire du pays de saisir des machines électorales à travers les Etats-Unis, sur lequel la commission a mis la main.
Ou, comme le révèle le New York Times lundi soir, cet ordre de Donald Trump à son avocat pour contacter le ministère de l'Intérieur, et -- là encore -- prendre le contrôle des fameuses machines, au coeur des théories du complot farfelues du camp Trump.
Après avoir entendu plus de 400 témoins, la commission parlementaire épluche désormais plus de 700 pages de documents, dont certains ont été délibérément déchirés par Donald Trump... et recollés par son personnel.
Parmi ces centaines d'archives, certaines informations "que l'ancien président avait espéré garder cachées", assurent les élus à la tête de cette commission.
Les intentions de Donald Trump, elles, n'ont en tout cas plus grand-chose de secret.
"Renverser l'élection" présidentielle était bel et bien l'intention du milliardaire républicain, a-t-il confirmé ce week-end dans un communiqué.
"Tellement de fraudes et d'irrégularités", a-t-il fustigé au sujet du scrutin que sa marée de casquettes rouges et lui croient encore volé.
Pour savoir jusqu'où exactement Donald Trump a osé aller dans sa croisade, la commission dite "du 6 janvier" a lancé des assignations à comparaître en rafale dans l'entourage de l'ancien magnat de l'immobilier. L'un d'entre eux a déjà été inculpé pour avoir refusé de témoigner.
Ce groupe d'élus avance à toute vitesse, soucieux de publier ses travaux avant les élections de mi-mandat lors de laquelle les républicains promettent une "vague rouge", et d'enterrer les travaux de l'enquête parlementaire.
- Trésor de guerre -
Donald Trump voit aussi son parti gagnant, et paraît déjà se positionner pour la prochaine échéance: la présidentielle de 2024. Lundi soir, il a semblé plus que jamais candidat, se targuant d'avoir un trésor de guerre de plus de 122 millions de dollars, un montant sans précédent pour un ancien président.
"Ils détestent que je batte tous les records", a-t-il lancé, accusant les médias de ne pas vouloir couvrir ses réussites. Ou de s'attarder trop sur ses déconvenues.
Mais il existe encore de sérieux obstacles dans sa potentielle course à la Maison Blanche.
Même si son parti venait à remporter les législatives de novembre, Donald Trump devra aussi se confronter au regard de ses pairs conservateurs, qui pour certains ont sérieusement commencé à prendre leurs distances.
Un de ses plus proches alliés, le sénateur Lindsey Graham s'est empressé de qualifier d'"inappropriées" les promesses de supposées grâces présidentielles de l'ancien locataire de la Maison Blanche.
En parallèle, plusieurs élus de son camp travaillent depuis des semaines sur un projet de loi spécifiquement mis sur pied pour éviter que toute élection ne puisse être renversée. Ou que l'Histoire ne bégaie.
N. Nilsson--BTZ